Pourquoi adapter la rééducation chez un patient obèse ?
L’obésité affecte l’ensemble des fonctions biomécaniques. Le centre de gravité est déplacé, les articulations portantes sont sursollicitées, et la posture est altérée. Ces patients présentent fréquemment des douleurs chroniques, une désadaptation à l’effort et une limitation de leurs activités de la vie quotidienne.
En parallèle, les comorbidités sont fréquentes : diabète, apnée du sommeil, arthrose, hypertension, syndrome métabolique. Toutes ces composantes exigent une adaptation fine des protocoles de rééducation. Le kinésithérapeute doit aussi tenir compte des traitements médicamenteux, qui peuvent induire une fatigabilité accrue, ou encore des antécédents chirurgicaux comme une chirurgie bariatrique.
Votre rôle en tant que kinésithérapeute est d’agir au carrefour du mouvement, de la fonction et de la motivation, en tenant compte de l’histoire personnelle du patient, de ses capacités réelles et de ses objectifs. La rééducation n’est pas un modèle unique : elle doit être co-construite et évolutive.
Pour démarrer efficacement, le bilan fonctionnel joue un rôle central. Découvrez comment adapter votre évaluation kiné à l’obésité et poser les bases d’un programme individualisé.
Comment structurer un bilan kiné chez un patient obèse ?
La première étape est de mener un bilan fonctionnel complet, en intégrant à la fois des mesures objectives et l’expérience vécue du patient.
Outils recommandés
- Test de marche de 6 minutes (TM6) : mesure de l’endurance à l’effort et outil d’évolution dans le temps.
- Échelle de Borg : auto-évaluation de la dyspnée à l’effort, très utile pour ajuster l’intensité.
- Tour de taille et IMC : repères de risque métabolique mais à compléter par une analyse fonctionnelle.
- Grille d’observation : évalue les transferts, la qualité du mouvement, la posture, la statique.
- Entretien motivationnel : indispensable pour identifier les leviers de changement.
Astuce pro : proposez un petit questionnaire sur les habitudes de vie (temps sédentaire, alimentation, sommeil, stress). Cela vous donnera des pistes précieuses pour personnaliser la prise en charge et pour fixer des objectifs fonctionnels réalistes.
Quelles étapes dans la stratégie de rééducation ?
1. Relancer le mouvement en douceur
La phase initiale consiste à rompre l’inertie tout en respectant les douleurs et les limites articulaires du patient. L’approche doit être progressive et sans jugement.
- Activités portées : vélo assis, balnéothérapie, mobilisation active en décharge.
- Exercices respiratoires et posturaux : essentiels pour la posture, le souffle et la conscience corporelle.
- Travail segmentaire : réintégration motrice des membres inférieurs, dissociation ceinture pelvienne et scapulaire.
Les séances doivent être courtes, bien encadrées, avec un feedback constant. L’objectif est d’installer un climat de confiance et d’éviter tout échec.
2. Renforcer les chaînes musculaires profondes
Le renforcement est indispensable pour soutenir le squelette et prévenir les troubles musculosquelettiques. Il doit commencer dès que possible, mais à faible intensité.
- Ciblez la sangle abdo-lombaire, les fessiers et les quadriceps.
- Travaillez en isométrique ou avec des charges légères.
- Utilisez des supports comme des ballons, coussins d’équilibre ou planches instables.
💡 Intégrer des ateliers de proprioception permet également de travailler l’équilibre, souvent perturbé dans l’obésité.
Ce travail de renforcement est d’autant plus crucial en présence de douleurs articulaires ou de fatigue chronique. Apprenez à intégrer les comorbidités comme l’arthrose ou l’apnée dans votre stratégie de rééducation.
3. Intégrer progressivement l’endurance
Une fois les douleurs mieux contrôlées et le mouvement restauré, la rééducation peut inclure une composante cardiovasculaire.
- Marches fractionnées, même sur quelques mètres au départ.
- Cycloergomètre à résistance basse, avec suivi de la fréquence cardiaque.
- Applications ou podomètres pour suivre la progression quotidienne.
N’hésitez pas à introduire des séances à domicile encadrées à distance : vidéos, plannings personnalisés, carnet de suivi.

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Quelle posture thérapeutique adopter ?
L’obésité est souvent associée à un vécu de rejet ou de stigmatisation médicale. Votre posture doit être bienveillante, non culpabilisante et valorisante.
- Ne commentez pas le poids : concentrez-vous sur les progrès fonctionnels.
- Soulignez les avancées, aussi modestes soient-elles (moins d’essoufflement, amélioration du sommeil, meilleur équilibre).
- Impliquez le patient dans les choix thérapeutiques et les objectifs.
Le rapport au corps étant souvent altéré, une communication empathique est essentielle. L’alliance thérapeutique est votre meilleur outil pour maintenir l’engagement sur le long terme.
Quelles erreurs éviter dans cette prise en charge ?
- Négliger la progressivité : aller trop vite risque de majorer la douleur ou la fatigue.
- Proposer un programme standardisé : chaque patient a un vécu, une histoire, une physiologie.
- Ignorer les troubles psychologiques associés : anxiété, dépression, TCA doivent être pris en compte.
- Travailler en isolement : le lien avec les autres professionnels (diététicien, médecin, APA, psychologue) est fondamental.
Rester flexible et à l’écoute permet d’éviter la démotivation ou l’abandon précoce.
Focus : que faire en cas d’obésité sarcopénique ?
Cette forme d’obésité, souvent silencieuse, se caractérise par une masse musculaire faible malgré un IMC élevé. Elle touche principalement les personnes âgées ou très sédentaires.
Conséquences
- Faible tolérance à l’effort ;
- Risque accru de chutes ;
- Difficulté à monter des escaliers ou à se relever du sol.
Le traitement repose sur un renforcement musculaire analytique, orienté sur la qualité du geste, la régularité des séances et la sécurisation des appuis. Le kiné joue ici un rôle pivot pour retarder la dépendance.
Et après ? Assurer un suivi durable
Ne laissez pas le patient seul une fois la rééducation initiale terminée. Proposez :
- Un programme d’auto-rééducation à domicile clair et adapté ;
- Des supports visuels (fiches, vidéos, applications simples) ;
- Un relais vers une activité physique adaptée de proximité ;
- Une progression encadrée vers des activités de vie réelle (marche, escaliers, transports).
Un suivi régulier, même espacé, permet de réajuster les objectifs et d’éviter les rechutes. L’éducation thérapeutique doit accompagner le patient dans l’intégration durable de l’activité physique dans sa vie.
Au-delà du protocole, la qualité de la relation thérapeutique joue un rôle déterminant dans l’adhésion à long terme. Voici comment construire une alliance durable avec vos patients en situation d’obésité.
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