Le RPIB en addictologie : repérage et intervention brève

Par Thomas Cornet

10 avril 2025

7 min

Le repérage précoce et l’intervention brève (RPIB) est une mesure de prévention qui permet de repérer un mésusage d’alcool chez un patient et d’intervenir en fournissant les informations nécessaires pendant une consultation courte. Le RPIB vise à motiver un changement chez les patients à risque ou à usage nocif d’alcool avant le développement de la dépendance. Retrouvez les informations essentielles ici ou dans notre formation addictions pour médecin généraliste.

Définition du RPIB

Le RPIB est un acronyme qui signifie Repérage Précoce et Intervention Brève. D’après la Haute Autorité de Santé (HAS), le RPIB est une mesure de prévention qui vise à repérer un comportement de consommation de substance psychoactive et à entraîner un changement de celui-ci vers une baisse des consommations.
Il concerne principalement les personnes non dépendantes. Bien qu’elles puissent bénéficier du RPIB, les personnes dépendantes doivent être prises en charge dans des structures spécialisées en addictologie.

 

Avec le RPIB, en addictologie, on distingue le repérage précoce et l’intervention brève :

 

- Le repérage précoce : il permet d'identifier les signes avant-coureurs ou les facteurs de risque d’un problème de santé, comme l’addiction à l’alcool, avant qu’il ne s’aggrave. Plusieurs moyens peuvent être utilisés, comme les évaluations, les dépistages ou l’utilisation de questionnaires spécifiques.
- L’intervention brève : c’est une méthode d’aide ciblée et concise, focalisée sur les comportements à risque identifiés lors du repérage précoce. Elle est mise en application lors d’un entretien court dont l’objectif est de motiver le patient à modifier ses comportements et/ou chercher une aide supplémentaire.

 

Dans le cadre du RPIB pour l’alcool, il s’agit d’identifier les patients à risque et de les encourager à réduire ou à cesser leur consommation afin de réduire les dommages en termes de santé, comme la cirrhose alcoolique, et leur éviter de devenir dépendants.

 

L’objectif consiste donc à prévenir les risques avec un entretien court, qui peut être intégré aux situations courantes de soins, au domicile du patient ou dans le cadre d’une consultation en cabinet.

Les questionnaires de repérage

Il existe des questionnaires qui peuvent aider à repérer un mésusage d’alcool et/ou un trouble lié à l’usage d’alcool. Deux questionnaires peuvent être utilisés par le médecin généraliste :

 

- Le test AUDIT (Alcohol Use Disorder Identification Test) est un test qui permet d’établir un mésusage d’alcool à partir de trois questions (les trois premières questions de l’AUDIT). Ce questionnaire permet de différencier un usage simple d’un mésusage d’alcool.
- Le questionnaire FACE (Formule pour Approcher la Consommation d’alcool par Entretien) est composé de cinq questions (dont deux en commun avec l’AUDIT). Il aide à repérer la dépendance et la perte de contrôle.

 

La mise en évidence d’un mésusage d’alcool doit être associée à une évaluation addictologique complète intégrant une évaluation médicale, psychiatrique et sociale, ainsi que les dommages hépatiques et neurologiques. L’objectif est de prendre en charge le patient dans sa globalité et, dans les cas plus graves, de prendre en charge le delirium tremens.

 

Le questionnaire AUDIT porte sur la consommation d’alcool des douze derniers mois. Un score égale ou supérieur à 4 chez l’homme et à 3 chez la femme est un indicateur d’un mésusage d’alcool.

 

Le questionnaire FACE porte sur les douze derniers mois également. Un score égal ou supérieur à 4 chez la femme et à 5 chez l’homme est un signe d’un mésusage d’alcool.

 

Ces tests prennent la forme d’auto-questionnaires. Ils sont faciles à remplir et peuvent être déposés dans les salles d’attente pour que le patient remplisse lui-même le test et prenne conscience de sa consommation élevée d’alcool (ou à utiliser au cours d’une consultation spécialisée).

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Quelles informations délivrer ?

Face à un usage d’alcool à risque, il est possible de faire une intervention brève (RPIB pour l’alcool). Cette intervention de prévention secondaire doit être dispensée individuellement, en un temps court, visant à augmenter le niveau de conscience et de connaissances des troubles liés à la consommation d’alcool chez les sujets en usage à risque.

 

La durée d’une intervention brève est d’environ 5 à 20 minutes. L’objectif de cette intervention est de délivrer les bonnes informations au patient. Le patient peut poser des questions lors de cette consultation. Celle-ci peut être répétée dans le temps, si nécessaire, lorsque le patient revient consulter pour un motif lié à sa consommation d’alcool ou une autre problématique de santé.

 

Les informations à délivrer pour le repérage précoce et l’intervention brève sont les suivantes :

 

- les résultats de l’évaluation (le questionnaire utilisé) ;
- les seuils de consommation à risque ;
- les éventuelles complications du patient ;
- les avantages à diminuer la consommation d’alcool ;
- le choix d’un objectif de consommation si le patient est d’accord pour modifier sa consommation actuelle ;
- les méthodes de réduction de la consommation d’alcool, à la demande du patient.

 

Un document d’information écrit est généralement remis au patient pour qu’il puisse le relire après la consultation afin qu’il s’inscrive plus facilement dans un processus de changement.

Point de vigilance du RPIB

Il est important que les médecins généralistes et les infirmiers soient formés pour le repérage précoce avec intervention brève (RPIB), par exemple avec une formation prévention addiction. C’est une solution pour augmenter le repérage précoce et le dépistage, et pour agir avant que l’addiction ne s’installe dans le temps.

 

L’intervention est réalisée de façon empathique, sans jugement, en laissant le choix au patient du point de vue de sa prise en charge. Il faut toutefois veiller à certains points avec le RPIB :

 

- les questionnaires courts peuvent entraîner de mauvaises interprétations : ils sont accessibles, mais ils sont aussi limités ;
- il est possible de faire les questionnaires FACE et AUDIT en même temps, en cas de doutes, pour vérifier s’il y a des différences dans les réponses ; 
- il faut distinguer les situations qui nécessitent une intervention brève et celles qui nécessitent une intervention en addictologie ;
- il faut vérifier que le patient dispose de toutes les informations nécessaires pour prendre conscience de sa consommation d’alcool et réussir à la diminuer.

 

Retrouvez tous nos conseils dans notre formation en addictologie à distance ! Notre formation addictions est une formation pour médecin généraliste, qui peut être entièrement financée avec le DPC !

 

Aujourd’hui, en addictologie et avec le RPIB addiction, le sevrage total n’est plus systématiquement appliqué. Des études ont montré qu’une réduction d’alcool pouvait entraîner des bénéfices évidents pour la santé en termes de pronostic, de mortalité et de nombre de jours d’hospitalisation.

 

Il est donc important de laisser le choix au patient, même s’il n’est pas prêt à arrêter complètement, car le sevrage total peut être un obstacle aux soins.

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