Tout savoir sur le bloc de branche en cardiologie

Par Thomas Cornet

10 octobre 2022

9 min

Qu’est-ce qu’un bloc de branche ? Découvrez les troubles de la conduction intraventriculaire, les hémiblocs et branches ainsi que la meilleure façon d’identifier un bloc de branche typique, le tout en lien avec la lecture d’un électrocardiogramme. 

Les troubles de conduction intraventriculaire

Sur le tracé ECG, un QRS fin est le synonyme d’une activité myocardique ventriculaire empruntant les voies de conduction rapides qui sont :

 

  • le faisceau de His ;
  • les branches ;
  • les cellules de Purkinje.

La vitesse d’activation des cellules de Purkinje est de quatre mètres par seconde tandis que la vitesse de propagation électrique dans le myocarde est de 0,5 mètre par seconde. C’est pour cette raison que la moindre interruption de la conduction rapide dans les faisceaux va provoquer un élargissement des QRS. Les voies de conduction rapide sont des autoroutes pour l’activation électrique. La conduction s'y propage très rapidement et dès qu’elle est obligée de prendre les voies moins larges de conduction myocardique, la durée de dépolarisation est beaucoup plus longue. Cela se traduit par des QRS plus larges sur l’électrocardiogramme.

 

Ces troubles de conduction dans les branches du faisceau de His peuvent être atrioventriculaires ou intraventriculaires. C’est ce qu’on appelle un bloc de branche. Elles sont dites intraventriculaires si elles sont situées sous le nœud auriculoventriculaire. Le nœud atrioventriculaire se situe sous la paroi antéro-septale de l’oreillette droite. Il se prolonge par le faisceau de His. Ce dernier traverse les ventricules. On parle alors de conduction intraventriculaire. Ainsi, les troubles de conduction intraventriculaire sont situés dans les branches du faisceau de His qui traversent les ventricules.

 

Si vous observez le faisceau de His, vous notez que la branche postérieure est bien plus épaisse que les deux autres. Elle est donc plus résistante et on voit rarement des blocs de la branche droite sur un ECG.

 

Lorsque vous aurez analysé suffisamment de tracés ECG, notamment en suivant la formation DPC proposée par Walter Santé, l’aspect d’un bloc de branche vous paraîtra de plus en plus familier. Le signe principal est un aspect en V1 qui est :

 

  • positif pour le bloc de branche droit ;
  • négatif pour le bloc de branche gauche. 

 

D’autres signes peuvent confirmer ce diagnostic typique de bloc de branche. Ainsi, le bloc de branche gauche sur ECG se traduit sur V1 par une onde QS unique, sans onde R. La différence est importante lorsque vous vous interrogez sur l’origine de l'arythmie, quand vous voulez savoir s’il s’agit d’une tachycardie ventriculaire ou d’une tachycardie supraventriculaire transmise par un bloc de branche. Fiez-vous à l’aspect global du tracé.

Apprenez à lire un ECG

Apprenez à lire un ECG

Un point sur les hémiblocs et branches

Le bloc de branche est un trouble de la conduction intraventriculaire dans les branches du faisceau de His. La branche gauche se divise en deux hémibranches :

 

  • la branche postérieure gauche ;
  • la branche antérieure gauche.

 

Lorsque seule l'une de ces branches est touchée, on parle d’hémibloc. Dans le cas d’un bloc de branche antérieur, le QRS va être dévié vers la gauche et légèrement élargi, souvent en dessous de 120 millisecondes. Il est alors important d’observer une déviation axiale gauche inférieure à 45 degrés, traduite par une onde QRS positive en D1 et négative en aVF. Une petite onde Q en aVL témoigne d’une activation septale issue de la branche postérieure.

 

Le bloc de branche droit ECG se manifeste classiquement dans la dérivation V1 par un aspect rSr’, un QRS élargi > 120 ms, et une onde T inversée. C’est un trouble fréquent, souvent bénin chez les sujets jeunes, mais pouvant révéler une pathologie sous-jacente s’il apparaît de manière récente ou s’il est associé à d'autres troubles de conduction.

 

Le bloc de branche gauche, quant à lui, est plus préoccupant car il peut masquer ou simuler des signes d’ischémie myocardique. Il se présente par une onde QS en V1 et un élargissement du QRS supérieur à 120 ms.

 

Quand la conduction est altérée à la fois dans la branche droite et dans une hémibranche gauche, on parle alors de bloc bifasciculaire. Ce tableau peut précéder un bloc complet et justifie une surveillance étroite, voire la pose d’un pacemaker chez certains patients à risque.

 

Il est également possible d’observer un bloc bifasciculaire associé à un bloc de branche droit. Dans ce cas, il peut s’agir de :

 

  • un bloc de branche droit associé à un bloc antérieur gauche (BBASG) ;
  • ou un bloc de branche droit associé à un bloc postérieur gauche (BBPG).

 

Ces associations sont des formes avancées de troubles de conduction, qui doivent être reconnues sur l’ECG et suivies de près en fonction du contexte clinique.

 

Lorsque les trois branches (branche droite, antérieure gauche et postérieure gauche) sont touchées, on parle de bloc trifasciculaire ou de bloc alternant. Dans ce cas, la mesure HV est souvent supérieure à 70 millisecondes et le risque de bloc auriculo-ventriculaire complet est majeur.

 

La reconnaissance d’un bloc bifasciculaire ou d’un bloc de branche alternant doit conduire à une évaluation rythmologique et souvent à la pose d’un stimulateur cardiaque.

 

Le bloc bifasciculaire peut précéder des troubles du rythme plus graves. Apprenez à les identifier en consultant notre article sur les troubles du rythme cardiaque.

 

Si vous souhaitez en apprendre davantage sur la lecture de l’ECG, renseignez-vous sur la formation ECG en ligne proposée par Walter Santé. Proposée dans son intégralité par le Dr Denis Amet, elle associe la théorie à la pratique.

 

Type de blocDérivations clésQRSCaractéristiques ECGSignification clinique
Bloc de branche droit (BBD)V1, V2> 120 msrSr’, onde T inverséeFréquent, souvent bénin isolé
Bloc de branche gauche (BBG)V5, V6> 120 msOnde QS, absence d’onde R en V1Peut masquer un infarctus, à surveiller
Bloc bifasciculaireD1, aVF, V1VariableBBD + hémibloc gauchePeut évoluer vers un bloc AV complet
Bloc trifasciculaireToutesQRS très large, PR longBBD + BBG alternants, PR allongéUrgence rythmologique, pacemaker souvent requis

Comment identifier un bloc de branche typique ?

Les cellules myocardiques se dépolarisent spontanément à une fréquence variable en fonction de leur localisation. Certaines cellules présentes dans le nœud sinusal ont la fréquence la plus élevée du muscle cardiaque avec un rythme variant de 60 et 100 battements par minute, et qui peut encore monter pendant d’effort.

Bon à savoir

Avant de diagnostiquer un bloc de branche, il est essentiel de maîtriser les bases de la lecture de l'ECG. Consultez notre guide sur comment lire et interpréter un ECG pour renforcer vos compétences.

 

 Le nœud atrioventriculaire présente un rythme de 35 à 40 battements par minute. Si le nœud sinusal ne fonctionne pas, le nœud atrioventriculaire prend le relais en augmentant sa propre fréquence. L’automatisme du nœud atrioventriculaire est totalement fiable.

 

Si le nœud atrioventriculaire s’arrête, le faisceau de His actionne une fréquence entre 20 et 25 battements par minute. Mais l’automatisme du His n’est pas fiable, car il peut s’arrêter à tout moment. Donc, avec une impulsion électrique dont l’origine se situe dans le His ou les branches, le risque d’arrêt cardiaque est grand.

 

Le bloc alternant est défini par l’apparition d’un bloc droit puis d’un bloc gauche complet, chez la même personne. On le constate rarement sur des enregistrements de quelques secondes, mais plus sur de longs enregistrements. Cette organisation de la conduction cardiaque est très grave et nécessite la pose d’un stimulateur cardiaque, autrement dit d'un pacemaker.

 

D'autres anomalies du rythme, comme le flutter cardiaque, peuvent influencer l'interprétation de l'ECG. Découvrez comment les reconnaître dans notre article dédié.

Formez-vous avec le docteur Amet

Formez-vous avec le docteur Amet

ECG : indications, réalisation et interprétation

Vous pouvez identifier un bloc de branche sur l’ECG grâce aux éléments suivants :

 

  • un PR dépassant 20 millisecondes jusqu’à une onde P bloquée, dans le cas d’un bloc AV intranodal ;
  • un retard d’activation de l’onde R associé à un QRS supérieur à 120 ms, pour le bloc de branche gauche ;
  • une petite onde R et une onde S profonde traduisent un bloc fasciculaire antérieur gauche ;
  • un QRS fragmenté ou très long, avec une onde T très haute sont le signe d'un bloc intraventriculaire.

 

Apprenez à reconnaître une maladie coronaire aiguë en lisant notre article qui définit la pathologie ainsi que les 4 phases du syndrome coronarien.

 

Pour approfondir votre interprétation des blocs de branche et d'autres anomalies cardiaques, découvrez notre formation ECG pour médecins généralistes animée par le Dr Denis Amet.

Téléchargez le programme de la formation ECG en PDF

Commentaires

Publier un commentaire

Un doute, une question, nous vous répondrons dans les meilleurs délais.

Sur le même thème

Thomas Cornet

7 août 2023

L’électrocardiogramme est un examen pouvant être réalisé par un médecin généraliste à condition qu’il soit équipé d’un électrocardiographe, d’une ceinture et d’électrodes. Dans cet article, découvrez quand réaliser un ECG, quelle cotation appliquer, mais aussi la possibilité de suivre une formation pour les médecins généralistes.

Thomas Cornet

11 octobre 2022

Médecins généralistes, vous vous demandez quels médicaments prescrire contre les troubles cardiaques ? Des solutions existent, bien qu'aucun médicament ne soit capable d'accélérer le cœur durablement. Certains réduisent les arythmies quand d'autres peuvent s’avérer toxiques pour les organes du patient. Découvrez comment accélérer le cœur de vos patients grâce à la classification de Vaughan-Williams. Elle répartit les antiarythmiques en quatre classes. Apprenez également à repérer les signes d’intoxication sur les tracés ECG. 

Thomas Cornet

11 octobre 2022

Découvrez les caractéristiques des maladies du cœur, les différentes phases du syndrome coronarien, mais aussi l’importance de la surveillance du patient. Plusieurs pathologies coronariennes peuvent avoir pour conséquence un sous décalage ou un sus décalage du segment ST sur un ECG, la plus grave étant la maladie coronaire aiguë. 

Thomas Cornet

20 juin 2022

En tant que professionnel(le) de santé, vous devez régulièrement mettre à jour vos connaissances selon le plan de formation DPC. Les maladies cardiovasculaires sont la première cause de mortalité dans le monde. Il semble donc judicieux d’apprendre à installer et à interpréter un électrocardiogramme, au sein même de votre cabinet.

Mais comment préparer un ECG ? Découvrez les bases du protocole standardisé puis, si vous le souhaitez, approfondissez vos connaissances en suivant notre formation ECG réservée aux médecins généralistes. Vous verrez que mener un électrocardiogramme est possible en cabinet médical.