Identifier le bon contexte clinique : le premier épisode aigu
La bronchiolite aiguë est définie comme un premier épisode de gêne respiratoire basse chez un nourrisson de moins de 12 mois, en contexte viral et saisonnier. Il s’agit d’une atteinte des petites voies aériennes, provoquant une obstruction transitoire (œdème, mucus, inflammation).
Ce point est essentiel : si l’enfant a déjà présenté d’autres épisodes similaires, ou s’il a plus d’un an, le diagnostic de bronchiolite devient moins probable et l’orientation vers un asthme du nourrisson ou une autre pathologie doit être envisagée.
Le diagnostic est cliniquement posé, sans besoin d’imagerie ni de test virologique en première intention.
Évaluer la gravité selon trois niveaux cliniques
La HAS distingue trois niveaux de gravité, permettant d’adapter la prise en charge :
Bronchiolite légère
- État général conservé
- Alimentation satisfaisante (> 50 %)
- SpO2 > 95 %
- Pas ou peu de signes de lutte
→ Suivi ambulatoire avec surveillance parentale, informations précises, et contact facilité
Bronchiolite modérée
- Gêne respiratoire plus marquée
- Signes de lutte visibles
- Alimentation réduite mais possible
- SpO2 entre 92–95 %
→ Nécessite surveillance rapprochée, réévaluation à 24–48h, voire orientation si aggravation
Bronchiolite sévère
- SpO2 < 92 % ou cyanose
- Tirage important
- Refus alimentaire
- Altération de la vigilance
→ Hospitalisation systématique, voire passage en soins intensifs selon critères associés
Le recours à un score de gravité clinique type Wang est encouragé pour objectiver l’évaluation.

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Ne pas prescrire de traitements médicamenteux
La prise en charge de la bronchiolite aiguë du nourrisson repose sur une observation clinique rigoureuse, mais aussi sur une sobriété thérapeutique. Depuis plusieurs années, les études et les recommandations successives (HAS, CNPP, sociétés savantes de pédiatrie) ont permis de clarifier un point fondamental : aucun traitement médicamenteux ne modifie l’évolution naturelle de la bronchiolite.
Voici les principaux médicaments à proscrire, avec les arguments cliniques et scientifiques associés.
Bronchodilatateurs (salbutamol, adrénaline, terbutaline)
Pendant des années, les bronchodilatateurs ont été largement utilisés face à des sibilances ou une gêne respiratoire. Or, les données scientifiques sont formelles : ils n’apportent aucun bénéfice chez les nourrissons présentant une bronchiolite aiguë.
- Aucune réduction de la durée des symptômes
- Pas d’effet sur le taux d’hospitalisation
- Risque de faux soulagement transitoire, qui retarde parfois une orientation utile
- Potentiels effets secondaires : tachycardie, agitation, déshydratation
La HAS déconseille leur usage systématique. Seules des situations très spécifiques peuvent justifier un test thérapeutique, sous surveillance stricte.
Corticostéroïdes (oraux ou inhalés)
Aucun bénéfice n’a été démontré pour les corticoïdes dans le traitement de la bronchiolite :
- Ils ne réduisent ni la durée des symptômes,
- Ni le risque de récidive,
- Ni les hospitalisations.
Leur prescription expose à des risques d’immunosuppression locale ou systémique, et crée de fausses attentes chez les parents (“cela va calmer l’inflammation”).
Ils sont donc formellement contre-indiqués en phase aiguë de bronchiolite.
Sérum salé hypertonique (3%)
Utilisé par le passé en nébulisation, le sérum salé hypertonique a été évalué dans de nombreux essais cliniques : les résultats sont insuffisants pour le recommander.
- Aucune efficacité prouvée sur les scores cliniques
- Risque d’irritation bronchique ou de majoration de la toux
- Supplanté par les lavages doux au sérum physiologique standard
Antibiotiques
La bronchiolite étant une infection virale, les antibiotiques n’ont aucune indication en première intention.
Ils ne doivent être utilisés que si :
- Il existe une suspicion claire de surinfection bactérienne (otite purulente, foyer pulmonaire à l’auscultation, fièvre persistante avec syndrome inflammatoire biologique),
- Le nourrisson est immunodéprimé ou à haut risque infectieux.
En dehors de ces cas, les antibiotiques augmentent l’antibiorésistance, perturbent le microbiote et renforcent la médicalisation inutile.
Antitussifs, mucolytiques et expectorants
Ces médicaments sont non seulement inefficaces, mais potentiellement dangereux chez le nourrisson :
- Les antitussifs inhibent un réflexe de défense essentiel
- Les mucolytiques peuvent majorer l’encombrement bronchique
- Aucun effet positif n’a été démontré sur l’évolution de la bronchiolite
Recommandation HAS : contre-indiqués chez les enfants de moins de 2 ans.
Kinésithérapie respiratoire conventionnelle
Autrefois courante, la kiné respiratoire est désormais non recommandée dans la phase aiguë :
- Risque d’aggravation de la détresse respiratoire
- Augmentation des pleurs, fatigue, gêne
- Pas d’amélioration documentée sur l’évolution
La kiné peut avoir un intérêt en post-bronchiolite, dans le cadre de sécrétions résiduelles ou de pathologies sous-jacentes, mais jamais en première intention.
Résumé des traitements à éviter
Pourquoi ces prescriptions persistent-elles ?
Malgré les recommandations, certaines pratiques perdurent. Plusieurs facteurs peuvent l’expliquer :
- Attentes parentales fortes : la prescription est perçue comme un acte rassurant
- Réflexes cliniques anciens : pratiques acquises en internat ou par mimétisme
- Volonté de “faire quelque chose” face à une détresse ressentie
- Confusion entre bronchiolite et asthme du nourrisson
C’est pourquoi la formation continue Bronchiolite du nourrisson reste un levier indispensable pour :
- Aligner les prescriptions avec les données probantes
- Réduire la variabilité des pratiques
- Renforcer le discours médical auprès des familles
- Mieux différencier les pathologies obstructives du nourrisson
Mettre en place des soins non médicamenteux adaptés
Les seuls gestes recommandés sont :
- Désobstruction nasale douce avec sérum physiologique (sans aspiration systématique)
- Fractionnement de l’alimentation si besoin
- Maintien de l’allaitement maternel
- Surveillance régulière de l’état général
En parallèle, un accompagnement parental est essentiel :
- Revoir les signes d’aggravation à surveiller
- Prévoir une consultation de réévaluation si doute
- Éviter la collectivité si nourrisson fragile ou prématuré
L’enfant doit rester allongé sur le dos, dans une chambre aérée (~19 °C), sans exposition au tabac.
Prévention 2024–2025 : un tournant majeur avec la prophylaxie
Les nouvelles mesures de prévention du VRS ont modifié en profondeur la stratégie pédiatrique :
Anticorps monoclonal nirsevimab (Beyfortus®)
- Injection unique en début de saison
- Pour tous les nourrissons à risque élevé (prématurité, comorbidités respiratoires)
- Réduction significative des hospitalisations liées à la bronchiolite
Vaccination maternelle (Abrysvo®)
- Recommandée en fin de grossesse (32–36 SA)
- Protège le nourrisson dans les premières semaines de vie
- Efficacité prouvée sur la réduction des formes graves
💡 Ces deux approches sont complémentaires, et intègrent la stratégie nationale de prévention 2024–2025. Le pédiatre a ici un rôle de repérage des profils éligibles et de conseil parental.
Ce qu’il faut retenir pour le pédiatre en 2025
- La bronchiolite est une pathologie virale aiguë, fréquente, mais généralement bénigne
- L’évaluation clinique structurée (gravité, score) guide la décision
- Il faut éviter toute prescription médicamenteuse inutile
- La prise en charge repose sur les soins de confort et la surveillance rapprochée
- De nouvelles armes préventives (nirsevimab, vaccin maternel) changent la donne
- L’accompagnement des familles est central pour limiter les passages aux urgences
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Bronchiolite nourisson
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