Prévenir le syndrome main-pied en cas de cancer

Par Alphonse Doutriaux

11 avril 2024

7 min

La chimiothérapie est une formidable opportunité de traitement de nombreux cancers. Elle cause malgré tout divers effets indésirables, parmi lesquels le syndrome main-pied. Ce dernier affecte surtout la paume des mains et la plante des pieds, ce qui rend beaucoup de situations quotidiennes au mieux inconfortables, au pire très douloureux. Il existe pourtant des moyens de prévenir et de soulager ces symptômes.

Qu'est-ce que le syndrome main-pied ?

Le syndrome main-pied ou érythrodysesthésie palmo-plantaire est l’un des effets indésirables de certaines chimiothérapies. Il consiste en une réaction inflammatoire en lien avec une fragilisation des micro-vaisseaux des mains et des pieds qui sont des zones du corps fortement sollicitées.

 

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Bon à savoir

Il affecte plus particulièrement la paume des mains et la plante des pieds, mais peut aussi toucher les coudes, les aisselles et les endroits soumis à des pressions, par exemple au niveau de la ceinture ou des bretelles du soutien-gorge.

Les symptômes apparaissent quelques semaines après le début du traitement. Leur ampleur dépend des particularités de chacun mais aussi de la posologie de la chimiothérapie. En cas de conséquences trop invalidantes, l’oncologue devra potentiellement modifier le dosage ou espacer les cures de chimiothérapie.

Rappel

Le syndrome main-pied est réversible et les symptômes disparaissent à l’arrêt du traitement. Ces informations sont délivrées au patient assez tôt et font partie des étapes d’annonce d’un cancer.

Symptômes du syndrome

Voici les symptômes du syndrome main-pied affectant les malades du cancer sous chimiothérapie :

  • engourdissement des extrémités, fourmillements, picotements, brûlures, douleurs ;
  • desquamation de la peau, rougeurs, gonflements ;
  • cloques, ulcères, écorchures ou gerçures.

Il existe divers stades d’avancement du syndrome main-pied, qui vont du simple inconfort à la remise en cause des manipulations quotidiennes et la marche. Voici les 3 grades du syndrome main-pied tels que développés dans les formations professionnelles pour pharmaciens.

  • Grade 1 : il y a d’abord des rougeurs et des gonflements, une sensibilité épidermique accrue, des fourmillements, une sensation de brûlure. Ces sensations sont désagréables mais n’ont pas d’impact sur les gestes de la vie quotidienne du patient.
  • Grade 2 : la peau devient extrêmement sèche et plus gonflée, mais ces signes n’entravent pas les activités quotidiennes du malade.
  • Grade 3 : des signes plus radicaux comme des cloques, des crevasses et des œdèmes surviennent, associés à des douleurs s’apparentant à celles de piqûres ou de brûlures. A un stade plus avancé encore, la peau s’épaissit et desquame. C’est alors que les gestes de tous les jours (marche et préhension) deviennent difficiles et douloureux.

Comment le soulager ?

Il existe plusieurs gestes destinés à soulager l’inconfort et la douleur provoqués par le syndrome main-pied. Tour d’abord, c’est la cryothérapie qui soulage nettement les symptômes du syndrome main-pied. Ainsi il est recommandé d’appliquer du froid sur les zones concernées, plusieurs fois par jour, durant 15 minutes à chaque fois. On utilise pour cela des bains d’eau fraîche ou un bloc réfrigérant (recouvert d’une serviette).

 

Il existe également des semelles de gel froid à placer à l’intérieur de la chaussure.

 

L’hydratation des mains et des pieds constitue aussi un moyen de soulager la douleur. C’est pourquoi il est conseillé d’appliquer une crème nourrissante destinées aux peaux très sèches et sensibles, 1 à 2 fois par jour. 

Bon à savoir

Le choix de la crème se fait en concertation avec les professionnels en officine, qui ont acquis une expertise sur le sujet au cours de leur formation continue de pharmacien.

Enfin, un traitement analgésique est aussi envisageable. Le conseil du pharmacien d’officine est alors indispensable. L’oncologue peut aussi prescrire des corticostéroïdes, notamment dans le cas d’une chimiothérapie par voie intraveineuse toutes les 3 à 4 semaines.

Quelques gestes de prévention

Bon à savoir

Au-delà du soulagement d’un syndrome main-pied installé, il existe des mesures de prévention. Les pharmaciens suivent une formation professionnelle qui les place comme des interlocuteurs privilégiés à cette étape.

La prévention s’envisage dès avant le début du traitement de chimiothérapie. Un soin de manucure et pédicure servent ainsi à ôter en douceur les callosités susceptibles de devenir des zones critiques de développement des signes du syndrome main-pied.

 

L’hydratation soulage mais c’est aussi un excellent geste de prévention. C’est pourquoi il est fortement recommandé aux patients d’hydrater leur peau très régulièrement, particulièrement au niveau des plis, à l’aide d’une crème sans parfum à base de lanoline ou une crème à 10 % d’urée.

De même, le froid constitue aussi un moyen de prévention des symptômes du syndrome main-pied. Les patients peuvent faire tremper leurs mains et leurs pieds dans de l’eau froide ou appliquer des blocs réfrigérants sur chevilles et poignets pendant 15 minutes trois à quatre fois par jour idéalement.

 

S’agissant des gestes d’hygiène, les patients doivent utiliser préférentiellement un pain surgras pour sécheresse cutanée sévère ou une huile lavante, qui servira non seulement à nettoyer, mais aussi à purifier et relipider la peau. Il s’agit ensuite de sécher votre peau par tamponnement plutôt que par frottement.

 

Voici plusieurs autres astuces qui permettent de prévenir au mieux l’apparition des symptômes du syndrome main-pied :

  • éviter l’exposition au soleil et tout contact avec la chaleur comme de l’eau chaude ou un sol chaud, le sauna ;
  • porter des vêtements amples avec des coutures fines, des chaussures larges sans hauts talons, et des chaussettes confortables en coton ;
  • pour la nuit, placer un coussin entre les genoux ou porter un pyjama qui permettra d’éviter les frottements sur la peau ;
  • adopter des moments de repos avec surélévation des bras et jambes ;
  • ne pas porter de bandages, pansements ou bijoux serrés ;
  • éviter la marche pieds nus et la course à pied ;
  • éliminer les activités susceptibles de causer frottements ou pressions, comme le jardinage, le bricolage ou les tâches ménagères. Lorsque ces activités doivent vraiment être faites, il faut privilégier l’utilisation de gants, à retirer régulièrement pour éviter l’accumulation de chaleur.

Pour résumer

Accompagner un malade du cancer passe par cette éducation thérapeutique, qu’un pharmacien d’officine est à même de dispenser grâce à sa formation continue.

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