Diagnostic de la pathomimie

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Diagnostic de la pathomimie

Qu'est-ce que la pathomimie et comment la diagnostiquer ?

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8 min

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Par Marie Cèbe

La pathomimie est une maladie factice, entièrement provoquée par le patient, dans un état de conscience claire, mais dissimulée. Les lésions cutanées sont étonnantes et suggèrent la présence d’un trouble psychiatrique sous-jacent. Dans cet article, nous revenons sur la pathomimie, sa définition, son diagnostic et sa prise en charge. Grâce à notre formation pour médecin généraliste, apprenez à distinguer la pathomimie d’autres troubles cutanés et à adapter votre approche de la maladie.

Sommaire

  • Qu'est-ce que la pathomimie ?
  • De quels pathologies distinguer la pathomimie ?
  • Comment poser un diagnostic de pathomimie ?
  • Le syndrome de Münchhausen
  • Prise en charge et pronostic de la pathomimie
  • Téléchargez le programme de la formation Plaies aigües et chroniques en PDF

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Qu'est-ce que la pathomimie ?

La pathomimie cutanée est une pathologie introduite par Dieulafoy en 1908. Elle est l’expression corporelle de désordres psychiatriques. C’est une maladie factice, provoquée dans un état de conscience claire, dissimulée, mais dont la motivation est inconsciente ou irrationnelle. Bien souvent, les lésions d’une pathomimie cutanée ne ressemblent à rien de connu. Ce sont des dermatoses factices et artificielles.

 

La pathomimie, par sa définition, est un désordre psychiatrique peu évident et difficile à prendre en charge. Le trouble psychiatrique rencontré peut être grave, car la pathomimie est un épiphénomène de l’automutilation. Elle peut être la première extériorisation d’une maladie psychiatrique. Elle concerne différents états psychiatriques : états limites (instabilité émotionnelle), agressivité, perversion, manipulation, masochisme, hypocondrie, dépression ou actes suicidaires.

Bon à savoir

La pathomimie cutanée est un problème thérapeutique complexe où le généraliste tient le premier rôle, en étroite collaboration avec le psychiatre (bien que difficile à introduire), le dermatologue, le vulnologue et/ou l’infirmier. Il est conseillé de suivre une formation médicale continue pour médecin généraliste.

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De quels pathologies distinguer la pathomimie ?

La pathomimie doit être distinguée de la simulation qui présente d’autres caractéristiques :

  • une auto-provocation dissimulée ;
  • une motivation conscience ;
  • un but matériel : bénéfice social ou financier.

La pathomimie doit aussi être distinguée d’un trouble de conversion. La conversion est rare ; il y a une absence de conscience du rôle du patient dans la survenue des troubles et une motivation inconsciente.

 

Les automutilations et les attitudes compulsives sont à distinguer de la pathomimie. Elles possèdent leurs caractéristiques propres :

  • lésions reconnues comme telles par le patient (pas de secret ou de dissimulation) ;
  • difficultés à reconnaître l’attitude compulsive ;
  • trichotillomanies ;
  • tics de léchage ;
  • pachydermodactylie ;
  • excoriations névrotiques.

Les automutilations, quant à elles, surviennent dans des états psychiatriques avérés.

 

Les pathomimicries ont un meilleur diagnostic que les pathomimies en psychiatrie. Elles correspondent à l’induction de poussées de maladies connues par le/la patient(e) par exposition volontaire à l’agent responsable. Par exemple, un(e) patient(e) qui souffre d’un ulcère et qui souhaite garder un contact social avec l’infirmier(ère), peut manipuler l’ulcère afin de ralentir sa cicatrisation.

 

Les dermatoses par mystification (comme les ecchymoses péribuccales avec ventouse posée sur la bouche) sont souvent causées par des enfants ou des individus pervers qui reproduisent l’acte jusqu’à ce que le corps médical s’en rende compte.

Comment poser un diagnostic de pathomimie ?

Il y a une prédominance féminine dans les aspects cliniques de la pathomimie (75 % des cas). Le diagnostic précoce est essentiel, il permet de limiter les gestes agressifs qui aggravent la pathologie.

 

Les pathomimies peuvent concerner différentes sortes de lésions :

  • ulcérations ;
  • excoriations ;
  • nécroses cutanées ;
  • érythèmes, croûtes ou bulles ;
  • œdème segmentaire ;
  • alopécie ;
  • dystrophies unguéales…

La morphologie des lésions est variable, elle dépend du moyen utilisé (produits caustiques, brûlures thermiques, lacérations, injections de produits divers, pose de garrot ou de ventouse, etc.).

Bon à savoir

Le diagnostic de la pathomimie est souvent réalisé en observant attentivement l’aspect de la lésion, par exemple lorsque le médecin décide d’utiliser la cicatrisation dirigée ou de réaliser une détersion de plaie.

L’aspect clinique est curieux, il peut y avoir des bulles isolées, des plaies circonférentielles bien limitées, des stries linéaires, des ulcérations étendues ou au-dessus des genoux, des contrastes nets par rapport à la peau saine, etc. Les lésions touchent des zones corporelles accessibles aux mains (visage, membres supérieurs…). Il peut y avoir des complicités à deux personnes, notamment chez les enfants, avec des situations d’hétéro-pathomimie et des limites floues concernant les sévices sur enfants.

Bon à savoir

Les conditions d’apparition sont surprenantes et soudaines. Le patient peut même prédire ses lésions. L’évolution peut être rapide, mais elle est accompagnée de la permanence d’autres lésions cutanées.

Pour résumer, plusieurs éléments permettent le diagnostic clinique de la pathomimie cutanée :

  • la morphologie et la topographie des lésions ;
  • un interrogatoire souvent incohérent ;
  • des anamnèses creuses ;
  • un vagabondage médical ;
  • un effet rapidement favorable de l’occlusion ;
  • la découverte par hasard du moyen utilisé ;
  • la personnalité du patient.

Rappel

Le diagnostic est facile à évoquer, mais difficile à affirmer. Le médecin a toujours la crainte de laisser passer une maladie organique.

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Le syndrome de Münchhausen

Le syndrome de Münchhausen est une forme grave de pathomimie. Il possède certaines caractéristiques :

  • prédominance masculine ;
  • itinéraire médical déconcertant (consultations et hospitalisations innombrables, motifs insolites et non résolus, patient mythomanes) ;
  • lésions graves pouvant menacer le pronostic vital ;
  • expositions délibérées à de multiples explorations invasives ou à des interventions de différentes formes ;
  • volonté de séduction, puis attitude narquoise, accusatrice ou conflictuelle, avant la fuite.

Les pathomimies peuvent être cutanées, mais elles peuvent aussi concerner d’autres pathomimies d’organes, comme une fièvre au long cours, une anémie auto-créée (syndrome de Lasthénie de Ferjol), une trouble neurologique, une hyperthyroïdie, une hypoglycémie, un trouble psychiatrique (pseudo-psychose, délires…), etc. Dans tous les cas, les tableaux sont complexes et entraînent de multiples consultations.

Prise en charge et pronostic de la pathomimie

Dans le milieu médical, la tentation de rejet du pathomime est forte, mais il faut savoir infléchir les sentiments négatifs éprouvés à l’égard du mensonge ou de la manipulation. Il n’y a pas de comportement consensuel défini face à une pathomimie, mais il est recommandé d’éviter l’affrontement. 

Important

Il est préférable de ne pas forcer l’aveu (risque de passage à l’acte et d'aggravation du désordre psychique), mais de faire comprendre au patient que sa supercherie est démasquée.

Ces conseils peuvent être utiles dans la prise en charge de la pathomimie :

  • préserver le malade de la réalité du diagnostic évoqué ;
  • savoir que la pathomimie est une recherche de pouvoir, de contrôle de soi ;
  • révéler la supercherie, sans confrontation, au patient et à l’entourage ;
  • garder une attitude compréhensive, rassurante, humaine et professionnelle plutôt tournée vers le corps meurtri et non sur le psychisme ;
  • mettre en place des jalons et un travail de fond ;
  • mettre en lumière progressivement les problèmes psychologiques sous-jacent afin de faire disparaître des gestes devenus inutiles ;
  • prévoir un long travail d’approche et l’introduction d’un psychiatre une fois la confiance établie ;
  • évoquer la pathomimie de manière détournée.

Le pronostic évolutif est conditionné par la personnalité du patient (patient névrotique ou psychotique) et le désordre psychique plus ou moins important. Le pronostic est sévère : il y a 30 à 75 % des patients qui sont récidivants et 30 à 60 % des malades ont une affection psychiatrique caractérisée, avec une prédominance des dépressions et des tentatives de suicide.

Bon à savoir

Notre formation médicale continue pour médecin généraliste aborde le sujet de la pathomimie pour vous aider à diagnostiquer et à prendre en charge un patient souffrant de cette pathologie. La formation médecin généraliste de Walter Santé sur les plaies aiguës et chroniques est éligible au DPC.

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