Hypotension orthostatique : une cause fréquente de syncope

Par Thomas Cornet

1 août 2025

5 min

Chez de nombreux patients âgés ou polypathologiques, les pertes de connaissance inexpliquées s’accumulent. En tant que neurologue, vous êtes souvent sollicité pour explorer ces épisodes. Et bien que les examens soient parfois normaux, le patient continue de chuter, de se relever confus, ou de se plaindre de vertiges.

 

Ce type de tableau peut générer une certaine frustration clinique. L’épilepsie est souvent écartée. L’IRM est normale. L’EEG aussi. Pourtant, le patient revient. Ce qui est souvent négligé ? L’hypotension orthostatique.

 

Cette forme de syncope, pourtant fréquente, est sous-diagnostiquée. Elle mérite une attention particulière, car elle relève d’une dysrégulation du système nerveux autonome, domaine dans lequel le neurologue a un rôle-clé à jouer.

Mécanisme de l’hypotension orthostatique : une réponse inadaptée à la gravité

L’hypotension orthostatique correspond à une chute de la pression artérielle à la mise en position verticale. Normalement, le passage de la position couchée à la position debout active un réflexe vasopresseur compensatoire. Grâce à l’activation du système nerveux autonome, les résistances vasculaires périphériques augmentent, la fréquence cardiaque s’adapte et la perfusion cérébrale reste stable.

 

Mais chez certains patients, cette réponse ne se déclenche pas ou n’est pas suffisante. Le sang stagne dans les parties déclives, le retour veineux diminue, et une hypoperfusion cérébrale s’installe : c’est la syncope orthostatique.

 

Ce phénomène est particulièrement fréquent chez les sujets âgés, dénutris, polymédiqués, ou atteints de neuropathies autonomes.

Causes de l’hypotension orthostatique : les grands mécanismes

Il existe trois catégories principales de causes à connaître :

1. Défaillance neurogène (neuropathie autonome)

C’est ici que votre rôle de neurologue est central. La réponse baroréflexe est altérée, souvent en lien avec :

 

  • Maladie de Parkinson ou syndromes parkinsoniens atypiques (MSA)

  • Neuropathies autonomes diabétiques

  • Amylose, Syndrome de Guillain-Barré

  • Lésions médullaires (trauma, syringomyélie, SEP)

Ces patients peuvent présenter une syncope sans accélération de la fréquence cardiaque, malgré la chute tensionnelle.

2. Hypovolémie

Le patient a moins de sang en circulation :

 

  • Déshydratation

  • Diarrhée, vomissements

  • Hémorragies internes ou digestives

Ce terrain est fréquent chez les sujets âgés vivant seuls ou sous diurétiques.

3. Médicaments hypotenseurs

Parmi les plus souvent impliqués :

 

  • Anti-hypertenseurs (IEC, ARA II, alpha-bloquants)

  • Diurétiques

  • Psychotropes (antidépresseurs tricycliques, neuroleptiques)

  • Médicaments antiparkinsoniens

Une revue complète du traitement est indispensable dès le premier épisode de syncope orthostatique.

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Affiner le diagnostic étiologique, évaluer le risque, adapter la prise en charge et accompagner le patient sur le long terme.

Signes cliniques à l’interrogatoire

En tant que neurologue, votre efficacité repose sur l’interrogatoire et le contexte. Les signes d’appel sont souvent évocateurs :

 

  • Syncope ou vertige à la levée du lit, en particulier le matin

  • Trouble de la vue, sensation de tête vide, faiblesse des jambes

  • Chute inexpliquée, souvent sans prodrome net

  • Absence d’aura, de convulsion ou de confusion post-critique

Le patient peut ne pas relier la position debout à ses malaises. Il est donc essentiel de poser les bonnes questions.

Diagnostic positif : quelles mesures simples ?

Un diagnostic clinique est souvent suffisant.

 

  • Mesurez la pression artérielle couchée, puis debout à 1 et 3 minutes.

  • Une chute de ≥ 20 mmHg pour la PAS ou ≥ 10 mmHg pour la PAD confirme le diagnostic.

  • La fréquence cardiaque est un indice : en cas de défaillance neurogène, elle n’augmente pas ou peu malgré l’hypotension.

Si besoin, un test de table basculante (Tilt test) peut être proposé, notamment pour différencier une hypotension orthostatique d’une syncope réflexe.

Cas clinique type : le senior qui chute “sans raison”

Une patiente de 78 ans, diabétique de type 2 sous insuline et IEC, vit seule. Elle se plaint de “vertiges” le matin en se levant, et a chuté deux fois en dix jours. Aucune anomalie sur l’IRM cérébrale, EEG normal, pas d’épilepsie connue.

 

👉 Diagnostic : hypotension orthostatique d’origine médicamenteuse et neurogène probable.
Conduite : adaptation du traitement, hydratation, bas de contention, éducation posturale.

Prise en charge : priorités pour le neurologue

Votre rôle est d’identifier la cause et de proposer un plan d’action :

 

  • Rechercher une pathologie neurologique sous-jacente si signes d’atteinte autonome

  • Revoir les traitements hypotenseurs en coordination avec le médecin traitant

  • Proposer des mesures hygiéno-diététiques :

    • Levers progressifs

    • Rehausser la tête du lit

    • Prise de liquides et de sel suffisante

    • Port de bas de contention

Un traitement pharmacologique (fludrocortisone, midodrine) peut être discuté en cas d’échec des mesures non médicamenteuses.

Pourquoi cette forme de syncope est-elle souvent négligée ?

Elle ne s’accompagne pas toujours d’une perte de connaissance complète. Elle peut être fluctuante, associée à des plaintes vagues (“vertiges”, “malaise diffus”) et se confondre avec un trouble de la marche, une atteinte cérébelleuse ou une dépression.

 

C’est donc au neurologue d’en faire le diagnostic d’élimination prioritaire avant de s’engager dans des examens coûteux.

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Thomas Cornet

1 août 2025

En consultation neurologique, les pertes de connaissance inexpliquées sont fréquentes et parfois déroutantes. Parmi elles, les syncopes vagales sont à la fois fréquentes et bénignes dans leur mécanisme, mais elles peuvent facilement être mal interprétées.

 

Cette incertitude diagnostique peut conduire à des examens inutiles, voire à des traitements inappropriés, et alourdir le parcours de soin. Elle génère également une inquiétude importante chez les patients, souvent persuadés qu’il s’agit d’un trouble neurologique grave ou d’un trouble cardiaque.

 

En tant que neurologue, votre rôle est donc décisif. Vous êtes à même de poser un diagnostic fiable, de hiérarchiser les causes possibles, et surtout, de rassurer le patient tout en assurant sa sécurité. La maîtrise des différents types de syncopes, et en particulier de la syncope vagale, est essentielle dans votre pratique clinique.

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Chaque jour, des patients consultent pour des pertes de connaissance fugaces, décrites comme des “absences”, des “chutes inexpliquées” ou des “trous noirs”. En tant que neurologue, vous êtes souvent sollicité pour écarter un trouble épileptique ou neurologique sous-jacent. Mais parfois, le danger ne vient pas du cerveau : il vient du cœur.

 

Lorsqu’il s’agit d’une syncope cardiaque, l’enjeu dépasse largement le diagnostic différentiel. Ce type de perte de connaissance, souvent brutale, sans prodrome, peut être le signe d’un trouble rythmique sévère ou d’une cardiopathie sous-jacente à haut risque vital. Trop souvent, ces syncopes sont banalisées, ou explorées tardivement, exposant le patient à une issue dramatique.

 

Votre rôle est alors double : repérer les signes d’alerte, même subtils, et agir rapidement. Cet article vous donne les clés pour identifier une syncope cardiaque en consultation neurologique, interrompre les examens inutiles, et sécuriser le parcours de soin grâce à une orientation ciblée et prioritaire.

 

Thomas Cornet

1 août 2025

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1 août 2025

En tant que neurologue, vous êtes régulièrement confronté à des motifs flous mais fréquents : chute inexpliquée, malaise, perte de connaissance. Derrière ces termes imprécis peut se cacher une pathologie bénigne… ou une urgence vitale. Pourtant, faute de témoignage direct ou d’examen concluant, le diagnostic reste souvent incertain.

 

Cette incertitude diagnostique peut entraîner une dérive : examens répétés, traitements inadaptés, retards de prise en charge, voire erreurs d’orientation. Le risque n’est pas seulement clinique, il est aussi organisationnel et humain, pour vous comme pour le patient.

 

Pour éviter ces pièges, il est essentiel de structurer votre démarche face à une perte de connaissance brutale. Cet article vous aide à distinguer une vraie syncope d’un trouble neurologique, métabolique ou cardiaque, en affinant votre interrogatoire, votre raisonnement et vos décisions d’exploration. Vous y trouverez des repères cliniques concrets pour sécuriser vos diagnostics différentiels et mieux orienter le parcours de soin.

Thomas Cornet

1 août 2025

En tant que neurologue, vous êtes régulièrement sollicité pour évaluer une chute inexpliquée ou une perte de connaissance chez une personne âgée. Le problème, c’est que la distinction entre chute mécanique et véritable syncope est souvent difficile à établir. Le patient n’a parfois aucun souvenir de l’épisode. L’entourage parle de « malaise » ou de « faiblesse ». Et bien souvent, vous êtes consulté plusieurs jours après l’événement, sans trace clinique évidente.

 

Cette situation est pourtant loin d’être bénigne. La syncope chez la personne âgée est un facteur de morbi-mortalité sous-estimé. Elle est fréquemment mal orientée, parfois attribuée à tort à une chute simple, à un trouble de la marche ou à un syndrome confusionnel. Résultat : des examens non ciblés, une absence de traitement adapté… et un risque de récidive.

 

Notre formation Syncope vous donne les outils pour affiner votre raisonnement et repérer les red flags. Voici les éléments clés.

Thomas Cornet

1 août 2025

En consultation spécialisée comme en hospitalisation, vous êtes régulièrement sollicité pour une syncope inexpliquée. Pourtant, trop souvent, l’évaluation initiale se limite à un interrogatoire sommaire et un ECG normal. Résultat : pas de diagnostic posé, pas de traitement instauré, et un patient qui récidive.

 

La syncope n’est jamais anodine. Dans une population à risque, elle peut être le signe précurseur d’un trouble du rythme sévère, d’une hypoperfusion cérébrale chronique, ou d’un événement neurologique sous-jacent.

 

En tant que neurologue, votre rôle est d’assurer un bilan syncope rigoureux, structuré, et adapté à chaque profil clinique. La formation Walter Santé vous propose une méthodologie complète et applicable à vos cas du quotidien. Voici les étapes à retenir.