Syncope cardiaque : quels signes doivent alerter le neurologue ?

Par Thomas Cornet

1 août 2025

5 min

Chaque jour, des patients consultent pour des pertes de connaissance fugaces, décrites comme des “absences”, des “chutes inexpliquées” ou des “trous noirs”. En tant que neurologue, vous êtes souvent sollicité pour écarter un trouble épileptique ou neurologique sous-jacent. Mais parfois, le danger ne vient pas du cerveau : il vient du cœur.

 

Lorsqu’il s’agit d’une syncope cardiaque, l’enjeu dépasse largement le diagnostic différentiel. Ce type de perte de connaissance, souvent brutale, sans prodrome, peut être le signe d’un trouble rythmique sévère ou d’une cardiopathie sous-jacente à haut risque vital. Trop souvent, ces syncopes sont banalisées, ou explorées tardivement, exposant le patient à une issue dramatique.

 

Votre rôle est alors double : repérer les signes d’alerte, même subtils, et agir rapidement. Cet article vous donne les clés pour identifier une syncope cardiaque en consultation neurologique, interrompre les examens inutiles, et sécuriser le parcours de soin grâce à une orientation ciblée et prioritaire.

 

Une perte de connaissance peut-elle être vitale ?

En tant que neurologue, vous êtes souvent consulté pour explorer une perte de connaissance transitoire. Le patient évoque un « malaise », une « chute » ou un « trou noir », et le doute s’installe. Est-ce une épilepsie ? Une hypotension orthostatique ? Une syncope réflexe ?

 

Dans certains cas, ce n’est ni l’un ni l’autre : il s’agit d’une syncope cardiaque. Si elle est moins fréquente que les autres (environ 15 % des syncopes), elle est potentiellement mortelle. L’enjeu n’est plus seulement de rassurer le patient, mais de l’orienter rapidement vers les examens appropriés. Une syncope d’origine cardiaque peut précéder une mort subite. Il est donc crucial de savoir reconnaître les signes d’alerte, même en consultation neurologique.

Comprendre la syncope cardiaque : mécanisme et enjeux

La syncope cardiaque survient lorsqu’un obstacle brutal et réversible vient perturber le débit cardiaque. Contrairement à l’insuffisance cardiaque chronique, ici la baisse de débit est aiguë, brutale, et souvent transitoire. Le cerveau n’est plus correctement perfusé, entraînant une perte de connaissance immédiate, souvent sans prodromes.

 

C’est cette perte soudaine et imprévisible qui fait toute la dangerosité de la syncope cardiaque.

 

On distingue deux grands mécanismes :

 

  • Obstruction mécanique à l’éjection du sang : rétrécissement aortique serré, myocardiopathie obstructive.

  • Trouble du rythme cardiaque : bradycardie sévère, tachycardie ventriculaire, bloc auriculo-ventriculaire.

Quand suspecter une syncope cardiaque ?

Plusieurs critères d’alerte clinique doivent faire suspecter une origine cardiaque, même en l’absence d’antécédents :

 

  • Survenue à l’effort : typique du rétrécissement aortique chez le sujet âgé. Le patient s’effondre en marchant ou en courant.

  • Perte de connaissance sans prodrome : brutale, sans signe avant-coureur.

  • Palpitations précédant la syncope : orientent vers un trouble du rythme.

  • Antécédents familiaux de mort subite : pathologies héréditaires à risque (QT long, syndrome de Brugada…).

  • Terrain cardiopathique connu : infarctus, cardiomyopathie dilatée, traitement antiarythmique.

La syncope d’origine cardiaque est souvent “pauvre en symptômes mais riche en conséquences”.

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Affiner le diagnostic étiologique, évaluer le risque, adapter la prise en charge et accompagner le patient sur le long terme.

Cas typique à connaître

Cas clinique : un homme de 72 ans chute brutalement dans la rue après avoir couru pour attraper un bus. Il est retrouvé inconscient, mais récupère rapidement. Il n’a aucun souvenir de l’épisode. Pas de prodrome. Il a un souffle systolique connu, mais aucun bilan récent.

 

👉 Ce tableau correspond classiquement à une syncope d’effort sur rétrécissement aortique.
En tant que neurologue, votre rôle est de reconnaître cette situation à haut risque vital immédiat et de référer en cardiologie sans délai.

Différencier la syncope cardiaque des autres étiologies

Voici un tableau comparatif rapide, utile à intégrer dans votre raisonnement :

Critère

Syncope réflexe

Syncope orthostatique

Syncope cardiaque

Déclenchement

Douleur, stress, station debout

Changement de position

À l’effort ou au repos

Prodromes

Oui (nausée, flou visuel)

Parfois

Généralement non

Durée

Brève, récupération rapide

Brève

Très brève, risque de traumatisme

Risque vital

Faible

Modéré

Élevé

Quelle démarche adopter en tant que neurologue ?

Si la suspicion de syncope cardiaque est posée, même de manière modérée, vous devez :

 

  1. Arrêter tout bilan neurologique en cours si non prioritaire

  2. Prescrire sans délai :

    • ECG

    • Échographie cardiaque

    • Holter ECG

    • ± test d’effort (si symptomatologie à l’effort)

  3. Orienter vers un cardiologue ou les urgences en cas de risque immédiat

La rapidité de votre action peut littéralement sauver la vie du patient.

Le piège à éviter : banaliser une syncope chez un sujet cardiaque

Il ne faut pas confondre un malaise vagal chez un sujet stressé avec une syncope cardiaque chez un patient avec une cardiopathie sous-jacente. Une personne avec une fraction d’éjection diminuée, même stabilisée, ne doit jamais être banalisée si elle présente une perte de connaissance.

 

L’absence de prodrome, la survenue en position couchée, ou les antécédents cardiaques sont des red flags absolus.

Ce que vous devez toujours consigner

Pour sécuriser la suite du parcours de soin, veillez à consigner dans votre compte rendu :

 

  • L’hypothèse de syncope cardiaque suspectée

  • Les critères cliniques d’alerte retrouvés

  • L’absence de signe neurologique associé

  • La nécessité d’un avis cardiologique rapide

Ce que dit la recommandation ESC

Selon les dernières recommandations de la Société Européenne de Cardiologie (ESC), toute syncope à l’effort ou sans prodrome chez un sujet âgé, même en l'absence d'antécédents cardiaques formels, doit être considérée comme cardiaque jusqu’à preuve du contraire.

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Thomas Cornet

1 août 2025

En consultation neurologique, les pertes de connaissance inexpliquées sont fréquentes et parfois déroutantes. Parmi elles, les syncopes vagales sont à la fois fréquentes et bénignes dans leur mécanisme, mais elles peuvent facilement être mal interprétées.

 

Cette incertitude diagnostique peut conduire à des examens inutiles, voire à des traitements inappropriés, et alourdir le parcours de soin. Elle génère également une inquiétude importante chez les patients, souvent persuadés qu’il s’agit d’un trouble neurologique grave ou d’un trouble cardiaque.

 

En tant que neurologue, votre rôle est donc décisif. Vous êtes à même de poser un diagnostic fiable, de hiérarchiser les causes possibles, et surtout, de rassurer le patient tout en assurant sa sécurité. La maîtrise des différents types de syncopes, et en particulier de la syncope vagale, est essentielle dans votre pratique clinique.

Thomas Cornet

1 août 2025

Chaque jour, des patients consultent pour des pertes de connaissance fugaces, décrites comme des “absences”, des “chutes inexpliquées” ou des “trous noirs”. En tant que neurologue, vous êtes souvent sollicité pour écarter un trouble épileptique ou neurologique sous-jacent. Mais parfois, le danger ne vient pas du cerveau : il vient du cœur.

 

Lorsqu’il s’agit d’une syncope cardiaque, l’enjeu dépasse largement le diagnostic différentiel. Ce type de perte de connaissance, souvent brutale, sans prodrome, peut être le signe d’un trouble rythmique sévère ou d’une cardiopathie sous-jacente à haut risque vital. Trop souvent, ces syncopes sont banalisées, ou explorées tardivement, exposant le patient à une issue dramatique.

 

Votre rôle est alors double : repérer les signes d’alerte, même subtils, et agir rapidement. Cet article vous donne les clés pour identifier une syncope cardiaque en consultation neurologique, interrompre les examens inutiles, et sécuriser le parcours de soin grâce à une orientation ciblée et prioritaire.

 

Thomas Cornet

1 août 2025

Chez de nombreux patients âgés ou polypathologiques, les pertes de connaissance inexpliquées s’accumulent. En tant que neurologue, vous êtes souvent sollicité pour explorer ces épisodes. Et bien que les examens soient parfois normaux, le patient continue de chuter, de se relever confus, ou de se plaindre de vertiges.

 

Ce type de tableau peut générer une certaine frustration clinique. L’épilepsie est souvent écartée. L’IRM est normale. L’EEG aussi. Pourtant, le patient revient. Ce qui est souvent négligé ? L’hypotension orthostatique.

 

Cette forme de syncope, pourtant fréquente, est sous-diagnostiquée. Elle mérite une attention particulière, car elle relève d’une dysrégulation du système nerveux autonome, domaine dans lequel le neurologue a un rôle-clé à jouer.

Thomas Cornet

1 août 2025

En tant que neurologue, vous êtes régulièrement confronté à des motifs flous mais fréquents : chute inexpliquée, malaise, perte de connaissance. Derrière ces termes imprécis peut se cacher une pathologie bénigne… ou une urgence vitale. Pourtant, faute de témoignage direct ou d’examen concluant, le diagnostic reste souvent incertain.

 

Cette incertitude diagnostique peut entraîner une dérive : examens répétés, traitements inadaptés, retards de prise en charge, voire erreurs d’orientation. Le risque n’est pas seulement clinique, il est aussi organisationnel et humain, pour vous comme pour le patient.

 

Pour éviter ces pièges, il est essentiel de structurer votre démarche face à une perte de connaissance brutale. Cet article vous aide à distinguer une vraie syncope d’un trouble neurologique, métabolique ou cardiaque, en affinant votre interrogatoire, votre raisonnement et vos décisions d’exploration. Vous y trouverez des repères cliniques concrets pour sécuriser vos diagnostics différentiels et mieux orienter le parcours de soin.

Thomas Cornet

1 août 2025

En tant que neurologue, vous êtes régulièrement sollicité pour évaluer une chute inexpliquée ou une perte de connaissance chez une personne âgée. Le problème, c’est que la distinction entre chute mécanique et véritable syncope est souvent difficile à établir. Le patient n’a parfois aucun souvenir de l’épisode. L’entourage parle de « malaise » ou de « faiblesse ». Et bien souvent, vous êtes consulté plusieurs jours après l’événement, sans trace clinique évidente.

 

Cette situation est pourtant loin d’être bénigne. La syncope chez la personne âgée est un facteur de morbi-mortalité sous-estimé. Elle est fréquemment mal orientée, parfois attribuée à tort à une chute simple, à un trouble de la marche ou à un syndrome confusionnel. Résultat : des examens non ciblés, une absence de traitement adapté… et un risque de récidive.

 

Notre formation Syncope vous donne les outils pour affiner votre raisonnement et repérer les red flags. Voici les éléments clés.

Thomas Cornet

1 août 2025

En consultation spécialisée comme en hospitalisation, vous êtes régulièrement sollicité pour une syncope inexpliquée. Pourtant, trop souvent, l’évaluation initiale se limite à un interrogatoire sommaire et un ECG normal. Résultat : pas de diagnostic posé, pas de traitement instauré, et un patient qui récidive.

 

La syncope n’est jamais anodine. Dans une population à risque, elle peut être le signe précurseur d’un trouble du rythme sévère, d’une hypoperfusion cérébrale chronique, ou d’un événement neurologique sous-jacent.

 

En tant que neurologue, votre rôle est d’assurer un bilan syncope rigoureux, structuré, et adapté à chaque profil clinique. La formation Walter Santé vous propose une méthodologie complète et applicable à vos cas du quotidien. Voici les étapes à retenir.