Définition et mécanisme de la syncope vagale
La syncope vagale, ou syncope réflexe, est le résultat d’une réponse inappropriée du système nerveux autonome. Elle survient lorsque l’organisme réagit à un stimulus bénin (stress, douleur, chaleur, émotion) par une activation excessive du nerf vague, conduisant à une bradycardie et/ou une vasodilatation périphérique. Ce double mécanisme réduit momentanément le débit cérébral et provoque une perte de connaissance brève.
Ce réflexe, parfois comparé à celui observé chez certains animaux (comme l’opossum), n’est pas pathologique en soi. Il constitue un mécanisme de défense archaïque, inadapté dans nos contextes modernes.
Reconnaître une syncope vagale en consultation
En tant que neurologue, votre première force réside dans l’interrogatoire clinique. C’est lui qui vous guidera vers le diagnostic. Voici les éléments clés à rechercher :
1. Les circonstances déclenchantes
Souvent très typiques :
- Station debout prolongée
- Atmosphère chaude
- Vue du sang ou douleur aiguë
- Émotions fortes, stress
2. Les prodromes
Signalés quelques secondes avant la chute :
- Nausées, sueurs froides
- Flou visuel
- Sensation de chaleur ou d’étouffement
- Bâillement, faiblesse généralisée
3. L’évolution
- Perte de connaissance brève (moins de 2 minutes)
- Chute avec relâchement musculaire
- Reprise rapide, sans confusion ni déficit focal
Ces trois éléments orientent fortement vers une syncope vagale typique, notamment chez un patient jeune et sans antécédent cardio-neurologique.
Différencier les formes cliniques
Il existe trois types principaux de syncope réflexe, selon le mécanisme prédominant :
- Forme cardio-inhibitrice : ralentissement sinusal ou bloc auriculo-ventriculaire
- Forme vasodépressive : chute tensionnelle isolée
- Forme mixte : combinaison des deux, la plus fréquente
Cette distinction peut guider la conduite à tenir si les syncopes sont récidivantes ou invalidantes.

Affiner le diagnostic étiologique, évaluer le risque, adapter la prise en charge et accompagner le patient sur le long terme.
Exclure les diagnostics différentiels
Votre regard de neurologue est aussi essentiel pour éliminer d’autres causes de pertes de connaissance, parfois graves :
- Crise comitiale : confusion post-critique, morsure de langue, mouvements toniques
- Accident ischémique transitoire : déficit focal neurologique transitoire
- Hypotension orthostatique : contexte de lever, sans prodrome
- Trouble du rythme cardiaque : survenue brutale sans facteur déclenchant
C’est votre capacité à analyser l’histoire du patient dans le détail qui vous permet d’éviter une escalade diagnostique inutile.
Quand compléter le bilan ?
La syncope vagale typique ne justifie pas d’examens complémentaires en première intention. Toutefois, certains critères doivent vous alerter :
- Survenue en position allongée
- Absence totale de prodrome
- Antécédents familiaux de mort subite
- Palpitations ou douleurs thoraciques associées
Dans ces cas, une évaluation cardiologique est recommandée, incluant :
- ECG
- Holter ou monitoring prolongé
- Test d’inclinaison (si doute persistant)
- Échographie cardiaque
Agir face aux syncopes récidivantes
Lorsque les épisodes se répètent et deviennent invalidants, plusieurs stratégies peuvent être envisagées :
- Réentraînement à l’orthostatisme
- Recommandations hygiéno-diététiques (hydratation, sel, bas de contention)
- Thérapies comportementales si anxiété associée
- Médication exceptionnelle (fludrocortisone, midodrine)
Le test d’inclinaison reste un outil de choix pour objectiver le mécanisme réflexe et orienter la prévention.
Cas cliniques : entraînez votre raisonnement
Cas 1
Un étudiant de 23 ans perd connaissance après une prise de sang. Prodromes nets, récupération rapide, ECG normal.
👉 Diagnostic : syncope vagale typique, sans besoin de bilan.
Cas 2
Femme de 56 ans, chute brutale en position debout sans prodrome, antécédents familiaux de mort subite.
👉 Diagnostic : doute sur trouble rythmique → ECG, Holter, avis cardio.
Ces cas illustrent l’importance de l’analyse contextuelle dans votre prise de décision.
Rassurer et informer : votre rôle pédagogique
Une fois le diagnostic établi, votre rôle ne s’arrête pas là. Vous devez rassurer le patient, tout en l’équipant pour prévenir les récidives :
- Expliquer le mécanisme réflexe
- Insister sur le caractère bénin de l’épisode
- Proposer des manœuvres préventives en cas de prodrome (croisement des jambes, contractions musculaires)
- Éviter chaleur, station debout prolongée, déshydratation
Cette éducation thérapeutique simple peut suffire à restaurer la confiance et l’autonomie du patient.
Enjeux médico-légaux et traçabilité
Formalisez systématiquement :
- Le diagnostic : “Syncope vagale probable sur arguments cliniques”
- La démarche de non-prescription : “Pas d’élément en faveur d’une pathologie organique à ce stade”
- Les conseils donnés
Cela protège à la fois le patient et votre responsabilité professionnelle.
Intégrer les recommandations ESC
Les recommandations 2023 de la Société Européenne de Cardiologie (ESC) insistent sur :
- La valeur de l’interrogatoire
- La désescalade diagnostique en cas de syncope réflexe évidente
- La prise en charge interdisciplinaire, centrée sur le risque
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