Liste des médicaments bradycardisants

Par Alphonse Doutriaux

28 janvier 2025

8 min

L’association de plusieurs médicaments peut entraîner des troubles du rythme cardiaque, comme la bradycardie. Opposée à la tachycardie, la bradycardie est un ralentissement anormal du rythme cardiaque, de moins de 60 battements par minute. Souvent, la bradycardie a une cause médicamenteuse, lorsqu’elle n’est pas liée à une pathologie. Alors que certains médicaments sont bradycardisants, l’association de plusieurs médicaments peut également être à l’origine de ce trouble du rythme. On parle alors d'une iatrogénie médicamenteuse.

Les troubles du rythme cardiaque

Les troubles du rythme cardiaque sont fréquents chez les sujets âgés. Ils sont définis comme étant un trouble de la conduction intracardiaque, c’est-à-dire un retard ou une interruption de transmission de l’influx électrique cardiaque, transitoire ou permanent. L’influx se propage ensuite du nœud sinusal au nœud auriculo-ventriculaire.

 

Plusieurs types de médicaments peuvent entraîner des troubles du rythme cardiaque, en faisant appel à différents mécanismes :

  • des troubles hydro-électrolytique : l'équilibre hydro-électrolytique (entre le potassium, le sodium, le chlore, le calcium, le phosphore, le magnésium, etc.) est perturbé ;
  • une hypokaliémie : une faible concentration de potassium dans le sang ;
  • une hyperkaliémie : une forte concentration de potassium dans le sang ;
  • un effet direct sur le cœur.

Bon à savoir

Il existe plusieurs médicaments qui peuvent entraîner une bradycardie, c’est-à-dire un ralentissement du rythme cardiaque. Leur association chez une même personne peut augmenter le risque de troubles du rythme cardiaque.

L’électrocardiogramme (ECG) est l’examen utilisé pour enregistrer l’activité électrique cardiaque pendant un temps donné. Il permet de repérer les troubles du rythme cardiaque, par exemple :

  • un bloc sino-auriculaire : une bradycardie et une absence d’onde P ;
  • un bloc auriculo-ventriculaire : une bradycardie et un allongement de l’intervalle PR ;
  • un bloc de branche (les branches du faisceau de His) : une variation complexe QRS.

Rappel

La bradycardie, qui est l’inverse d’une tachycardie (une augmentation du rythme cardiaque), se manifeste par une fatigue ou un malaise. C’est un facteur de risque pour faire une torsade de pointe (interruption de la transmission de l’influx électrique) qui peut entraîner une mort subite, dans les cas graves. Les médicaments pour la bradycardie sont ceux utilisés pour traiter les troubles du rythme cardiaque (bêta-bloquants, digitaliques, certains hypertenseurs…).

Les torsades de pointes médicamenteuse

Une torsade de pointe est une tachycardie ventriculaire avec un allongement du QT, ce qui est potentiellement mortel, bien qu’étant généralement fugace. Le risque de syncope est tout de même à prendre en compte.

Bon à savoir

L’allongement du secteur QT peut être congénital chez certaines personnes. Ainsi, la prescription de médicaments qui peuvent entraîner des torsades de pointes doit toujours être précédée d’un électrocardiogramme (ECG). Si le patient présente un allongement QT, la prescription du médicament doit être évitée.

L’hypokaliémie, qui est un déficit en potassium dans le sang, est aussi un facteur de risque pour les torsades de pointes et la bradycardie des personnes âgées ou des patients à risque.

Certains médicaments peuvent entraîner des torsades de pointes :

  • les médicaments qui allongent le QT :
    • antiarythmique de classe I et III,
    • neuroleptiques,
    • fluoroquinolone,
    • macrolides,
    • anti H1,
    • antipaludéens,
    • sétrons,
    • méthadone,
    • imipraminiques ;
  • les médicaments hypokaliémiants :
    • diurétiques,
    • laxatifs,
    • sirolimus ;
  • les médicaments bradycardisants :
    • antiarythmiques de classe I et III,
    • bêta-bloquants,
    • inhibiteurs
    • calciques,
    • digitaliques,
    • anticholinestérasiques,
    • lithium.

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L'hypokaliémie

L’hypokaliémie est une concentration plasmatique de potassium inférieure à 3,5 mmol/L. Les conséquences de l’hypokaliémie sont les torsades de pointes, une faiblesse musculaire et une paralysie dans les cas les plus graves.

 

Les facteurs de risque sont les suivants :

  • une perte rénale : hyperaldostéronisme, hypercorticisme, alcalose métabolique chronique ;
  • une perte digestive : diarrhée ou vomissements importants ;
  • une association médicamenteuse (iatrogénie médicamenteuse).

Ainsi, certains médicaments peuvent entraîner une hypokaliémie (seuls ou en association) :

  • médicaments qui augmentent la perte urinaire : diurétiques hypokaliémiants, corticoïdes, amphotéricine B, certains antibiotiques, réglisse ;
  • médicaments qui augmentent la perte digestive : laxatifs ;
  • médicaments qui augmentent le transport extracellulaire vers intracellulaire : B2+ et insuline ;
  • autres médicaments : sirolimus.

Astuce

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L'hyperkaliémie

L’hyperkaliémie peut aussi entraîner des troubles du rythme cardiaque, comme une bradycardie chez une personne âgée. Elle correspond à une concentration plasmatique supérieure à 5 mmol/L. Elle peut être potentiellement mortelle (plus de 7,5 mmol/L) ou entraîner des signes cliniques associés :

  • troubles du rythme cardiaque importants (un allongement du secteur PR et QRS) ;
  • troubles de la conduction (une fibrillation auriculaire, voire un arrêt cardiaque) ;
  • faiblesses musculaires, paresthésies et paralysies.

Plusieurs situations peuvent entraîner une hyperkaliémie :

  • un défaut d’excrétion rénale du potassium : insuffisance rénale, néphropathies, insuffisance surrénalienne (hypoaldostéronisme) ;
  • un transfert extracellulaire du potassium : acidose, situation de lyse cellulaire, carence en insuline, hyperglycémie ;
  • un excès d’apport en potassium.

Rappel

L’âge est un facteur de risque pour l’hyperkaliémie, car les personnes âgées ont souvent une insuffisance rénale.

Le diabète favorise également l’hyperkaliémie, tout comme l’association de médicaments hyperkaliémiants. Ceux-ci sont nombreux.

  • Défaut d’excrétion rénale : médicaments qui entraînent l’hypoaldostéronisme (antagonistes des récepteurs à l’aldostérone, médicaments bloquant le système RAA, anti-inflammatoires non stéroïdiens, héparines, immunosuppresseurs et drospirénone).
  • Diminution de la sécrétion passive rénale : certains diurétiques (amiloride et triamtérène), anti-infectieux (triméthoprime) et blocage de la réabsorption Na (blocage canal Na).
  • Diminution de l’entrée cellulaire de potassium : bêta-bloquants non sélectifs et digitaliques (pour l’insuffisance cardiaque).

Important

Les pharmaciens doivent être alertés lorsque le taux de potassium dans le sang est supérieur à 5 mmol/L et tenir compte des facteurs favorisant, comme l’insuffisance rénale, le diabète, une lyse tumorale ou une acidose métabolique.

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