Prise en charge infirmière des patients sous anticoagulants

Par Alphonse Doutriaux

26 juin 2023

8 min

Les anticoagulants sont des médicaments à risque qui présentent des effets secondaires. L’infirmier a donc un rôle important à jouer dans la vigilance, la surveillance et la sécurisation de la prise d’anticoagulants dans les soins infirmiers qu'il donne à ses patients. Afin de bien prendre en charge ses patients, il est important de comprendre quelle est la responsabilité de l’infirmier, les étapes dans la prescription des médicaments anticoagulants, et les erreurs médicamenteuses les plus fréquentes.

En suivant les informations issues de notre formation infirmier sur les anticoagulants, nous abordons deux points fondamentaux dans la deuxième et la troisième partie : la vigilance concernant les dosages et la surveillance des effets indésirables pour les patients sous anticoagulants.

La responsabilité infirmière

Comprendre la responsabilité de l’infirmier

Dans l’administration des traitements, et plus particulièrement avec les médicaments anticoagulants, l’infirmier est responsable de ses actes et des éventuelles conséquences. Dans toutes les étapes de la prescription, chaque intervenant doit surveiller sa séquence. Ainsi, si une ordonnance n’est pas lisible ou si l'infirmier a un doute sur la posologie, il doit contacter le médecin et demander des précisions. Dans le cas contraire et suite à l’administration d’un mauvais traitement ou d’une mauvaise dose, l’infirmier est tenu pour responsable.

 

L’infirmier engage sa responsabilité civile, pénale et disciplinaire dans l’exercice de son métier. La responsabilité civile ou administrative n’a pas pour but de punir, mais d’octroyer des dommages et intérêts au patient. C’est la responsabilité pénale qui a pour objectif de punir les comportements dangereux ou illicites. Elle est toujours strictement personnelle. La sanction disciplinaire correspond à la violation d’une règle professionnelle particulière ou d’un dépassement des compétences réglementaires du Code de la santé publique.

Les médicaments à risque et les étapes de la prescription

En France, l’arrêté du 6 avril 2011 définit les médicaments à risque et la prudence à avoir, à chaque niveau de la prise en charge des patients :

  • la prescription ;
  • la dispensation ;
  • la détention ;
  • le stockage de l’administration et du suivi thérapeutique.

Cette sécurisation permet d’éviter les erreurs et les conséquences sur la santé des patients. Au niveau mondial, le terme de “High alert medications” (ou HAMs) est employé pour désigner les médicaments à risque.

Bon à savoir

60 % des erreurs médicamenteuses surviennent lors de l’administration du traitement (cette étape concerne l’infirmier). La vigilance doit donc être accrue.

Au moment de l’administration du médicament, la traçabilité est primordiale et obligatoire. Une bonne traçabilité comporte plusieurs points :

  • le nom du médicament, la forme, la dose, la voie d’administration ;
  • la date et l’heure ;
  • l’identification de la personne et la signature ;
  • la non-administration et le motif (le cas échéant) ;
  • les effets indésirables (le cas échéant) ;
  • les bénéfices obtenus (le cas échéant).

La traçabilité est importante pour la surveillance infirmière des patients sous anticoagulants (voir cours infimier et article à ce sujet).

Les erreurs médicamenteuses

L’erreur médicamenteuse peut revêtir plusieurs formes :

  • une erreur de médicament ;
  • un médicament périmé ou détérioré ;
  • une erreur de forme galénique ;
  • une erreur de dosage ;
  • une erreur de posologie ou de concentration ;
  • une erreur technique d’administration ;
  • une erreur de débit ;
  • une erreur de patient ;
  • une erreur technique de préparation.

Si vous avez un doute ou si vous avez fait une erreur, il est indispensable d’avertir le médecin, et de ne pas cacher une erreur, car elle peut avoir des conséquences sur la santé du patient.

La vigilance dans le calcul des doses d'anticoagulants

La prise en charge des patients sous anticoagulants passe par une vigilance dans le calcul des doses. L’anticoagulant n’est pas le médicament le plus compliqué dans le calcul des doses, mais il faut tout de même rester vigilant.

 

Le dosage d’un anticoagulant est calculé en fonction de plusieurs facteurs :

  • l’âge ;
  • le poids ;
  • la fonction rénale et hépatique ;
  • l’état de santé général du patient.

Les doses doivent être ajustées en fonction des résultats des tests biologiques mesurant la capacité du sang à coaguler (TP et INR).

 

Plusieurs temps sont à observer (les exemples sont donnés avec des AVK) :

  • le dosage initial : avec des AVK, le dosage initial dépend du patient et de la condition traitée ;
  • l’ajustement de la dose : les doses d’AVK doivent être ajustées régulièrement en fonction des résultats des analyses ;
  • la durée du traitement : la durée d’un traitement dépend de la condition traitée et de la réponse individuelle du patient sous anticoagulant ;
  • l’interaction médicamenteuse : les AVK peuvent interagir avec certains médicaments (même les médicaments en vente libre et les compléments alimentaires) ;
  • la surveillance régulière : un patient sous AVK doit être régulièrement surveillé par un médecin, sans oublier la surveillance du risque hémorragique par l'infirmier.

Puisque les héparines sont généralement administrées par voie intraveineuse, la surveillance passe par des tests biologiques et les doses peuvent être adaptées rapidement. Les doses des AOD (anticoagulants oraux directs) sont assez facilement adaptables (tests biologiques et ajustements en conséquence).

 

Il faut toujours informer le patient des éventuelles modifications de dosage et de traitement, en l’invitant à être observant (en notant la non-administration du médicament, le cas échéant). Il faut aussi inviter le patient à dire s’il n’observe pas son traitement afin de ne pas chercher d’autres causes aux résultats des tests biologiques.

La surveillance infirmière de la survenue d'effets indésirables

La surveillance des effets indésirables

Un effet indésirable est une réaction nocive et non-voulue d’un médicament. Les centres régionaux de pharmacovigilance sont là pour recueillir les témoignages sur les effets indésirables. Les notices des médicaments regroupent les effets indésirables recueillis auprès de ces centres. La pharmacovigilance est définie comme étant la surveillance, l’évaluation, la prévention et la gestion du risque d’effet indésirable médicamenteux (EIM). Son but est d’améliorer le rapport bénéfices-risques des médicaments, par exemple dans la surveillance d’un patient sous anticoagulant. Tout le monde peut déclarer la survenue d’effets indésirables.

 

L’imputabilité est un outil utilisé en pharmacovigilance afin d’évaluer la probabilité qu’un médicament soit responsable de l’effet indésirable observé chez un patient.

 

L’imputabilité peut être utilisée dans plusieurs cas :

  • pour évaluer les rapports d’effets indésirables après la commercialisation d’un médicament ;
  • pour identifier les risques potentiels associés à l’utilisation d’un médicament ;
  • pour aider à prendre des décisions concernant la sécurité et l’efficacité d’un médicament.

 

Afin de vérifier un effet indésirable dans la prise en charge des patients sous anticoagulants, l'infirmier doit vérifier les résultats biologiques et observer la fonction rénale, hépatique et la glycémie. Il doit aussi informer le patient du traitement à prendre (dosage, modifications, observances, effets indésirables) en l’intégrant à un programme d’éducation thérapeutique.

Les effets indésirables des anti-thrombotiques

Pour illustrer notre propos sur la surveillance d’un patient sous anticoagulant, voici une liste des effets indésirables qui peuvent survenir à la prise d’anti-thrombotiques :

  • des saignements ;
  • des hématomes ;
  • des ecchymoses ;
  • des ulcères gastriques ;
  • des insuffisances rénales ;
  • des réactions allergiques ;
  • des éruptions cutanées.

L’infirmier doit réaliser une surveillance étroite pour les patients sous anti-thrombotiques, et sous anticoagulants en général, en faisant des tests sanguins, en surveillant les paramètres vitaux et en vérifiant les signes de saignements ou d’autres effets indésirables pouvant survenir.

 

La prise en charge des patients sous anticoagulants nécessite une surveillance accrue et une bonne connaissance des traitements mis en place. Notre formation DPC infirmier vous délivre les informations essentielles et indispensables à la pratique de votre métier IDEL. Que ce soit dans le cadre d’une reconversion professionnelle infirmier ou d’une formation continue IDEL pour développer vos connaissances, cette formation Anticoagulants vous permet de revoir les bases et d’acquérir de nouvelles connaissances facilement, en ligne, et en ayant accès à vos cours à tout moment, où que vous soyez et quand vous le voulez !

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