Le rôle de l'infirmier dans le traitement des escarres

Par Alphonse Doutriaux

2 mars 2022

9 min

L'escarre est une plaie profonde qui, classée en quatre stades, peut être traitée différemment en fonction de la gravité de l'atteinte du tissu. Elle survient principalement chez les personnes âgées, que ce soit accidentellement, dans le cadre d'une maladie neurologique ou d'une pathologie en phase terminale. Elle fait partie des plaies auxquelles vous pouvez être confronté(e) en tant qu'infirmier(ère). Découvrez les spécificités du traitement des escarres par les infirmiers.

Sommaire

  • Qu'est-ce qu'une escarre et comment se forme-t-elle ?
  • Classification des escarres
  • L'évaluation des escarres
  • Le traitement des escarres par l'infirmier(ère)
  • Téléchargez votre fiche sur le traitement des escarres en PDF
  • Sources
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Qu'est-ce qu'une escarre et comment se forme-t-elle ?

Les escarres sont des pertes d'intégrité cutanée consécutives à l'immobilisation. Le facteur essentiel dans la formation de ces escarres est la pression. Autrement dit, une escarre apparaît suite à une immobilisation du plan cutané entre deux plans durs, généralement le plan osseux et une autre surface dure (une chaise, une table, le sol, etc.). Les escarres sont une pathologie fréquente chez les personnes âgées et les petits nourrissons. 


Certaines zones du corps sont plus susceptibles que d'autres d'héberger des escarres. On note une prédominance sur le talon, le sacrum, l'ischion, l'occiput (chez l'enfant), ou encore les épaules et le coude.


Plusieurs facteurs peuvent mener à la formation d'une escarre et peuvent être associés ou isolés. Les mécanismes les plus fréquents sont les suivants : 

  • une pression trop forte prolongée ;
  • des chocs traumatiques ;
  • un cisaillement ;
  • de l'hypoxie tissulaire ;
  • de la malnutrition ou insuffisance nutritionnelle ;
  • un défaut ou une absence de vascularisation ;
  • l'immobilisation prolongée ou sa réduction.

Classification des escarres

Afin d'adopter la bonne démarche de traitement d'une escarre, il est essentiel de commencer par identifier le stade de celle-ci. Le stade d'une escarre peut être déterminé de deux manières : en prenant en compte sa classification anatomique (plus communément utilisée) ou sa classification colorielle.


La classification anatomique des escarres est divisée en quatre stades.

  1. Au stade 1, l'escarre présente une rougeur qui ne disparaît pas à la vitropression (la zone ne devient pas blanche après avoir appuyé dessus). On appelle cela le syndrome de menace.
  2. Au stade 2, on constate une désépidermisation ou un décollement cutané qui touche l'épiderme et éventuellement le derme.
  3. Au stade 3, l'escarre est nécrosée. Elle est alors une plaie profonde avec des plaques de nécrose durablement installées, recouvrant en général des tissus sous-jacents dévitalisés.
  4. Au stade 4, la plaie est ouverte et profonde avec plus ou moins de nécrose. Il s'agit ici d'un ulcère résultant généralement d'une escarre de stade 3 après élimination des tissus nécrotiques.


La classification colorielle n'est pas divisée en stades mais cartographie l'avancée de l'escarre : 

Couleur de l'escarreAvancée de l'escarre
RoseÉpidermisation
RougeBourgeonnement
JauneFibrine
NoirNécrose
Maîtrisez la prise en charge des plaies

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L'évaluation des escarres

Pour évaluer le risque et le stade d'avancée d'une escarre, l'échelle fréquemment utilisée est l'échelle de Norton.

 

Cette échelle se divise en cinq sections, auxquelles correspondent 4 notes possibles (allant de 1 à 4). Après avoir noté la plaie en fonction des évaluations proposées dans chaque section, il faut additionner le total des points attribués.

 

Les cinq sections de l'échelle de Norton sont la condition physique, la condition mentale, l'activité, la mobilité, et l'incontinence.

Condition Physique État mental Activité Mobilité Incontinence 
Bonne4Alerte4Marche normalement4Normale4Aucune4
Moyenne3Apathique3Marche avec une aide3Diminuée3Occasionnelle3
Mauvaise2Confus2Assis en fauteuil2Très limitée2Urinaire2
Très mauvaise1Inconscient1Alité/totalement aidé1Immobile1Urinaire et fécale1

 

Si le score est inférieur à 16, le risque d'escarre est important ; plus le score se rapproche de 20, moins il y a de risque d'escarre.

 

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Le traitement des escarres par l'infirmier(ère)


Le meilleur traitement des escarres est la mise en place des axes préventifs, dont l'infirmier est responsable. Cette prévention se divise en quatre axes majeurs : l'effleurage, le support, l'hydratation et la décharge.

L'effleurage

L'effleurage est la première étape du traitement de l'escarre. Cette technique consiste à favoriser la micro-vascularisation cutanée au niveau des points d'appui (c'est-à-dire la circulation du sang dans les très fins vaisseaux sanguins de la peau) en massant sans appuyer sur la peau. 
Pour effectuer l'effleurage, le seul dispositif médical reconnu aujourd'hui est le Sanyrène ; sans Sanyrène, une huile (quelle qu'elle soit) fera l'affaire.


L'effleurage est indiqué pour les personnes alitées ou assises avec appui prolongé. 
Cependant, il est interdit lorsque l'escarre atteint le stade 1 (lorsque la vitropression ne fait pas disparaître la rougeur), ou que la zone concernée est inflammatoire.

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Le support

Le support peut être dynamique ou non, et peut prendre différentes formes :

  • un surmatelas, qui se pose sur le matelas ;
  • un matelas remplaçant le matelas ordinaire, comme un matelas à air, un matelas à eau, ou encore un matelas à mémoire de forme ;
  • un coussin spécialisé comme un coussin de gel, un coussin à air, ou un coussin gel et eau. Ces coussins peuvent être utilisés en complément d'un matelas ou d'un surmatelas.

Astuce

Ces différentes formes de support sont éligibles à la prescription par un(e) infirmier(ère). Vous avez donc le droit de les prescrire à vos patients dans le cadre du traitement d'une escarre. Si vous avez un doute, vous pouvez vous rendre sur le site ameli.fr qui renseigne précisément la liste de supports qui peuvent être prescrits.

Quel que soit le support choisi (choix qui se fera en fonction du risque ou de la présence d'une escarre, mais aussi en fonction du matériel disponible et des moyens humains), il est indispensable de limiter le nombre de couches entre le support et la peau du patient. Sur des matelas alternatifs par exemple, il est interdit de border le draps ou de mettre une alaise.

L'hydratation

La toilette est le premier soin à mettre en place chez un(e) patient(e) ayant une escarre et étant alité(e). Au cours de cette toilette, l'hydratation cutanée permet d'accélérer la cicatrisation de la plaie en la maintenant dans un environnement humide et chaud


L'hydratation cutanée ne se fait pas avec de l'eau mais avec des produits hydratants. Le lait, les lotions et le déxéryl sont les produits les moins hydratants ; pour le traitement adéquat d'une escarre, il faut au contraire favoriser des produits gras ou huileux, comme les huiles sèches, des corps gras ou des cérats et recompositions. Les produits les plus hydratants sont les huiles naturelles (jojoba, coco ou argan) : l'huile de coco est celle au meilleur rapport qualité/prix.

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La décharge

La décharge permet de ne pas mettre de pression sur la plaie existante. Elle s'effectue par mécanisme de matelas alternatifs, de coussins ou de cales. L'objectif de la décharge totale est d'optimiser la vascularisation de la plaie.


En fonction de l'emplacement de l'escarre, des positions de repos différentes sont à privilégier : latérale oblique pour le traitement de l'escarre sacrée ou trochantérienne ou ventrale pour l'escarre ischiatique par exemple.

Bon à savoir

Apprenez-en plus sur les escarres et tous les types de plaies dans la formation Plaies et Cicatrisations à destination des infirmiers de Walter Santé.

Téléchargez votre fiche sur le traitement des escarres en PDF

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